Cet article procède, conformément à l'article 2 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, au transfert de 15 Md€ de déficit cumulés des branches Vieillesse et Maladie du régime général vers la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES).
Saisi par le Premier ministre d’une demande d’avis portant sur l'interprétation des règles organiques encadrant le transfert de déficits à la Caisse d’amortissement de la dette sociale au moment du transfert, le Conseil d’Etat a confirmé que les dispositions organiques permettent au législateur de transférer de la dette sociale à la CADES à condition que les informations qui lui sont fournies lui permettent d'apprécier l’effet que ce transfert aura sur la durée d’amortissement. Cela implique qu’il dispose non seulement de projections présentant la durée d’amortissement de la dette déjà transférée, mais également de projections actualisées tenant compte des nouveaux montants dont le transfert est envisagé. Dans le cas où le Gouvernement prévoirait d’y procéder dans le cadre d’un PLFSS déjà en cours d’examen au Parlement, le Conseil d’Etat demande que les informations permettant au législateur d’apprécier les effets de ce transfert sur la durée d’amortissement puissent figurer dans l’exposé des motifs qui accompagnerait un éventuel amendement.
Le Conseil d’État considère en outre que les dispositions organiques l’autorisent, lorsque la trajectoire d’amortissement s’améliore et que la date d’extinction prévisionnelle de la dette est en-deçà du terme du 31 décembre 2033, à transférer de nouvelles dettes sociales à la CADES, y compris sans l’accompagner de nouvelles ressources affectées, si ce transfert ne porte pas le terme de l’amortissement de la dette sociale au-delà de cette date. A l’inverse, si la trajectoire d’amortissement de la dette sociale se dégradait et que le terme de l’amortissement était à l’avenir jugé susceptible de dépasser le 31 décembre 2033, la plus prochaine loi de financement de la sécurité sociale devrait affecter de nouvelles ressources à la CADES pour garantir que ce terme ne soit pas dépassé.
Afin de réduire le besoin de financement de l’ACOSS, cet amendement prévoit, conformément au cadre organique précisé par le Conseil d’Etat, la reprise d’une part importante des déficits des branches vieillesse et maladie du régime général par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES),. Dans le but de réduire à la fois les déficits cumulés de ces deux branches, il est proposé de reprendre 15 milliards d’euros de déficits cumulés de l’exercice 2024, sans apurer les déficits plus anciens restant à la charge de la branche vieillesse. En effet, les lois organique et ordinaire du 7 août 2020 relatives à la dette sociale et à l’autonomie ont repoussé la date d’extinction de la CADES au 31 décembre 2033 pour permettre un transfert de 136 milliards d’euros, visant à couvrir :
- les déficits cumulés de la branche « maladie » et de la branche « vieillesse » du régime général, ainsi que ceux de la CNRACL, dans la limite de 31 Md€, pour l’exercice 2019 ;
- les déficits cumulés de la branche « maladie », la branche « vieillesse » et la branche « famille » pour les exercices 2020 à 2023 ainsi que le Fonds de solidarité vieillesse du régime général, mais aussi la branche « vieillesse » du régime agricole, dans la limite de 92 Md€ ;
- Le soutien aux établissements publics de santé, notamment dans la perspective de leur désendettement, à hauteur de 13 Md€.
Ces transferts ont été effectués de la façon suivante :
- 20 Md€ au cours de l’exercice 2020 ;
- 40 Md€ au cours de l’exercice 2021 ;
- 40 Md€ au cours de l’exercice 2022 ;
- 27,2 Md€ au cours de l’exercice 2023 ;
- Enfin, 8,8 Md€ sur l’exercice 2024.
Cette dernière reprise s’est inscrite dans une trajectoire de reprises régulières depuis la création de la Caisse en 1996, qui l’a conduite à reprendre un total de 396,5 Md€, dont elle aura amorti 291 Md€ en 2026, soit plus de 70 % de la dette transférée.
Année de reprise de detteDette reprise cumuléeAmortissement annuelAmortissement cumuléSituation nette de l'année199623 2492 1842 184-21 065199725 1542 9075 091-20 063199840 3232 4447 535-32 788199942 2282 98010 515-31 713200044 1343 22613 741-30 393200145 9863 02116 762-29 224200248 9863 22719 989-28 997200353 2693 29623 285-29 984200492 3663 34526 630-65 7362005101 9762 63329 263-72 7132006107 6762 81532 078-75 5982007107 6112 57834 656-72 9552008117 6112 88537 541-80 0702009134 6115 26042 801-91 8102010134 6115 13547 936-86 6752011202 37811 67859 614-142 7642012209 02611 94971 563-137 4632013216 74512 44384 006-132 7392014226 88712 71796 723-130 1642015236 88713 513110 236-126 6512016260 49614 426124 662-135 8342017260 49615 044139 706-120 7902018260 49615 444155 150-105 3462019260 49616 253171 403-89 0932020280 49616 089187 492-93 0042021320 49617 813205 305-115 1912022360 49618 961224 266-136 2302023387 72818 305242 571-145 1572024396 49615 989258 559-137 9362025396 49616 195274 754-121 7722026396 49616 439291 193-105 304
Source : annexe 3 au PLFSS pour 2026
La Cades est donc actuellement engagée aujourd’hui dans le seul amortissement de ce dernier transfert. La durée d'amortissement des déficits passés repris par la Cades est présentée à l'annexe 2 du projet de loi de financement.
Les prévisions qui justifiaient la date retenue dans la loi organique pour l’extinction de la dette sociale, à savoir le 31 décembre 2033, ont été progressivement affinées et actualisées par la Cades au regard du contexte macro-économique dans le cadre de ses publications annuelles, destinées à informer le Parlement comme à permettre au Conseil constitutionnel de vérifier le respect des dispositions organiques. Cette actualisation s’est accompagnée d’une anticipation progressive de la date d’extinction de la dette sociale.
Aujourd’hui, les perspectives d’extinction de la dette sociale, telles qu’elles apparaissent en annexe au projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de 2024, sont les suivantes.
5 % des scénarios les plus favorablesScénario médian5 % des scénarios les plus défavorablesObjectifDate d’extinction prévisionnelle de la CADESmai-31juil-32mars-33Non-report de la date d’extinction de la dette portée par la CADES
Sur la base du scénario dit « médian », qui avait servi de fondement à l’analyse des précédentes reprises, la dette sociale devrait donc s’éteindre en juillet 2032. Même dans les scénarios les plus pessimistes, à savoir les 5 % des scénarios les plus défavorables, la dette s’éteindrait en mars 2033.
Pour accompagner le dépôt du présent amendement, le Gouvernement a conduit de nouvelles simulations actualisées pour estimer l’impact d’un transfert de 15 Md€ sur les perspectives d’extinction de la dette. En effet, l’impact à simuler est double :
- Le transfert conduit naturellement à augmenter le montant brut de la dette sociale à amortir et donc le montant des recettes affectées à cet amortissement ;
- Il aboutit en outre à modifier la composition de l’endettement de la Cades lui-même, pour intégrer cette part supplémentaire.
Dès lors, le transfert d’un montant supplémentaire de 15 Md€ aboutit aux scénarios suivants :
Scénario très pessimiste*Scénario pessimiste**Scénario médiandécembre 2033novembre 2033mai 2033
* Ce scénario correspond au scénario le plus optimiste parmi les 5 % de scénarios les plus pessimistes
** Ce scénario correspond au scénario le plus optimiste parmi les 10 % de scénarii les plus pessimistes
Sur la base du scénario médian, la dette transférée à la CADES serait donc amortie dans son ensemble au plus tard à la fin du mois de mai 2033, soit sept mois avant la date inscrite dans la loi organique. Même dans le scénario dit « le plus pessimiste », celle-ci serait amortie en décembre 2033.
S’agissant de l’affectation de la couverture des déficits des branches, il est proposé de répartir, au sein du régime général, la répartition entre les branches déficitaires, dont les situations nettes prévisionnelles sont les plus dégradées au 31 décembre 2025, soit les branches « maladie » et « vieillesse » du régime général. Cette répartition pourrait ainsi être la suivante :
- 9 Md€ pour la branche « maladie » ;
- 6 Md€ pour la branche « vieillesse ».
Cet amendement présente donc un transfert de dettes à cadre organique inchangé, du fait de la capacité d’amortissement supplémentaire qui est désormais constatée dans le cadre de la présentation annuelle des lois de financement de la sécurité sociale. Il entraîne un prolongement de l’affectation des recettes pour une durée équivalente à celle de la durée supplémentaire nécessaire pour l’apurement de cette dette en 2032, soit environ 11 mois.
Cette reprise de dette doit s’accompagner, en parallèle, de la mise en œuvre d’une trajectoire de réduction du déficit des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale en vue de son retour à l’équilibre d’ici à 2029.